Qu’a fait de mal Pandore?

On vous propose aujourd’hui de revenir sur la plus grosse gaffe de l’histoire de l’humanité. Enfin, d’après les Grecs bien sûr…

Dans la mythologie grecque Pandore est la première femme, conçue par Zeus, qui décida de la créer afin de se venger du titan Prométhée qui avait offert le feu aux Hommes sans son autorisation. Elle peut également être appelée Anésidora, « la Déesse de la terre qui préside à la fécondité », tandis que le nom « Pandore » peut être traduit par « celle qui a tous les dons » ou encore « celle qui est le don de tous [les dieux] ».

Fabriquée à partir d’argile et d’eau par Héphaïstos, Pandore est en effet le fruit d’un travail commun des dieux de l’Olympe, puisqu’elle reçut un don de chacun d’eux. Athéna lui donna la vie, l’habileté manuelle et l’habilla, Aphrodite la dota de la beauté et du pouvoir de séduire, Apollon du talent musical; enfin,Hermès lui enseigna la parole mais aussi, sur l’ordre de Zeus, l’art du mensonge.

Une fois ainsi créée, Zeus la proposa en mariage au frère de Prométhée,  Epiméthée, qui, bien qu’il avait promis à son frère redoutant une vengeance des dieux de ne jamais accepter de présent de la part Zeus, se laissa séduire par la beauté céleste de la jeune femme et accepta cette union. En guise de trousseau de mariage, Pandore apporta avec elle une boîte mystérieuse, ou plus exactement une jarre, dont Zeus lui avait fait don en lui interdisant de l’ouvrir.

Alexandre Cabanel (1823–1889), Pandore, 1873, huile sur toile, Walters Art Museum.
Alexandre Cabanel (1823–1889), Pandore, 1873, huile sur toile, Walters Art Museum.

Néanmoins, une fois devenue l’épouse d’Epiméthée, Pandore céda à la curiosité que le dieu Hermès avait instillé en elle, et ouvrit la boîte. S’en échappèrent alors tous les maux qui seraient infligés à l’humanité et que Zeus avait privé de voix afin que nul ne puisse les reconnaître et les prévenir: la Vieillesse, la Maladie, la Guerre, la Famine, la Misère, la Folie, le Vice, la Tromperie, la Passion, l’Orgueil ainsi que l’Espérance.  Elle voulut la refermer lorsqu’elle réalisa ce qui en sortait, mais il était trop tard, et seule l’Espérance resta à l’intérieur de celle-ci. En plus de justifier l’adage selon lequel la curiosité est un vilain défaut, ce mythe fondateur grec raconté par Homère et Hésiode peut être rapproché du mythe biblique d’Adam et d’Eve, tous deux rendant la femme, incapable de résister à la tentation, responsable de tous les malheurs qui incombèrent à l’humanité.

tableau de John William Waterhouse, Pandora
John William Waterhouse (1849–1917), Pandora, 1896, huile sur toile,collection privée.

L’histoire de Pandore, ou plutôt de sa descendance, peut aussi être rapprochée d’un autre célèbre épisode biblique, puisque sa fille Pyrrha épousa en secondes noces le fils de Prométhée, Deucalion,- qui était donc son cousin- et tous deux furent parmi les seuls mortels à survivre au déluge avant de repeupler la Terre.

Aujourd’hui, la boîte de Pandore est passée dans le langage courant, et cette expression est utilisée de nombreux contextes pour désigner quelque chose qui causerait la calamité et sèmerait la zizanie parmi les Hommes. En outre, la figure de Pandore accompagnée de sa boîte a été reprise par de nombreux artistes  au XIXème siècle, notamment les tenants du courant académiques français et les peintres préraphaélites qui reprennent les grandes légendes occidentales pour en délivrer une vision romantique où la femme, à la fois sensuelle et redoutable, occupe une place centrale. Il est intéréssant de noter que les représentations artistiques de Pandore diffèrent selon le moment de l’épisode qui est suggéré. Certaines toiles la représentent tenant dans ses mains sa boîte encore fermée: si les versions des peintres académiques français Jules-Joseph Lefebvre et Alexandre Cabanel sont hiératiques et fixent le spectateur, beaucoup d’autres saisissent une Pandore en proie à la curiosité qui scrute sa boîte en hésitant à l’ouvrir, quelques secondes avant de céder à la tentation: c’est le cas de celle de Lawrence Alma-Tadema et de la seconde version de Jules Joseph Lefebvre exécutée dix ans après la première.

D’autres représentations, plus audacieuses, comme celle de John William Waterhouse, évoquent quant à elles le moment fatidique de l’ouverture de la boîte; enfin, certains artistes comme Thomas Benjamin Kennington nous livrent une version plus émouvante qui retranscrit le désespoir et les remords de la jeune femme une fois la boîte ouverte et les maux s’étant échappés de celle-ci.

Pandora-1908-Thomas-Kennington
Thomas Benjamin Kennington,(1856-1916), Pandora, 1908, huile sur toile, collection privée.

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Une pensée sur “Qu’a fait de mal Pandore?

  • 30 avril 2018 à 19 h 46 min
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    Encore une fois merci pour ces belles pages fort intéressantes.
    L’occasion de découvrir les plus belles peintures de l’univers symboliste.
    Quelle érudition Héloïse.

    Bravo

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