10 héroïnes incontournables de la littérature

ELAINE D’ASTOLAT- THE LADY OF SHALOTT

Elaine, Toby Edward Rosenthal (1874) Art Institute of Chicago
Toby Edward Rosenthal (1848-1917), Elaine, 1874, huile sur toile, Art Institute of Chicago.

Surnommée la dame de Shalott (Lady of Shalott en anglais), Elaine d’Astolat est une figure féminine centrale à de nombreux récits arthuriens, dont l’histoire a été racontée dans la compilation de Thomas Malory au XVème siècle, l’une des principales sources sur les légendes arthuriennes, avant d’être reprise en 1859 par le poète anglais Alfred Tennyson dans son cycle de poèmes intitulé Idylls of the King et qui retrace l’histoire du roi Arthur et des chevaliers de la table ronde. Son histoire est celle d’une jeune femme, fille du seigneur Bernard d’Astolat, qui aperçoit le chevalier Lancelot lors d’un tournoi organisé par son père et en tombe aussitôt éperdument amoureuse. Malheureusement pour elle, le cœur du chevalier Lancelot est déjà pris par la belle Guenièvre, la femme du roi Arthur, et si Elaine le supplie de porter ses couleurs lors de la joute, il n’y consent qu’à la condition d’être déguisé pour que sa dame qui fait partie du public ne le reconnaisse pas. Ayant été blessé lors du combat, Elaine l’emmène dans sa chambre où elle le soigne, mais une fois remis, le chevalier lui propose de la payer pour ses services, et la jeune femme, humiliée, lui rend son bouclier qu’elle avait gardé. Lancelot quitte le château où il ne devait jamais revenir, désormais conscient des sentiments qu’Elaine nourrissait pour lui. Le cœur brisé, la jeune fille finit par mourir dix jours plus tard, et son corps fut déposé dans une barque qui fut emportée par le courant jusqu’au château de Camelot, où furent organisées en son honneur de magnifiques funérailles que le chevalier Lancelot tint à payer.

John William Waterhouse (1849-1917), The lady of Shalott, 1888, huile sur toile, Tate Museum.
John William Waterhouse (1849-1917), The lady of Shalott, 1888, huile sur toile, Tate Museum.

Dans un autre poème publié cette fois-ci en 1842, The Lady of Shalott, Alfred Tennyson livre une version légèrement différente de l’histoire d’Elaine, où celle-ci est enfermée dans une tour et condamnée à regarder le monde extérieur uniquement à travers un miroir. Ayant aperçu un jour le reflet du chevalier Lancelot, elle en tomba amoureuse et ne put résister à l’envie de le regarder directement, ce qui la condamna à s’enfuir et errer sur un bateau en chantant, où elle mourut de froid avant que son corps soit retrouvé grâce au courant qui l’avait ramenée au château de Camelot.

ELLEN- CHILD WATERS

Eleanor Fortescue-Brickdale (1872–1945), The Little Foot Page, (Le petit page à pied),1905, huile sur toile,Walker Art Gallery.
Eleanor Fortescue-Brickdale (1872–1945), The Little Foot Page, (Le petit page à pied),1905, huile sur toile,Walker Art Gallery.

Cette peinture illustre une ballade populaire anglo-écossaise appelée «Child Waters» ou «Burd Helen» issue des Reliques de Thomas Percy de la Poésie anglaise ancienne (1765). La ballade raconte la fidélité d’Ellen qui porte l’enfant de son amant sans cœur, Child Waters. Alors qu’elle est enceinte, ce-dernier insiste pour qu’Ellen le serve comme page, endurant parfois des conditions de vie plus difficiles que celles de ses chiens. Sur cette toile de la femme peintre préraphaélite Eleanor Fortescue-Brickdale, Ellen est montrée vêtue d’habits masculins et sur le point de couper ses longs cheveux magnifiques afin qu’elle puisse se faire passer pour un garçon. On aperçoit d’ailleurs sa robe et sa veste qui ont été jetées au premier plan avant d’être abandonnées.

 

KRIEMHILD- DAS NIBELUNGENLIED

Emile Lauffer (1837-1909), La complainte de Kriemhild, 1897, huile sur toile.
Emile Lauffer (1837-1909), La complainte de Kriemhild, 1897, huile sur toile.

Kriemhild est, avec Brunehilde, l’un des deux principaux personnages féminins de la saga épique germanique des Nibelungen, composée au XIIIème siècle. Sœur de Gunther, le roi des Burgondes, elle croise par hasard un jour la route du vaillant chevalier Siegfried qui séjourne à la cour de son frère et qui, sous le charme de la jeune princesse, se met en tête de l’épouser. Gunther finira par céder la main de sa sœur à Siegfried,connu pour ses qualités de guerrier invincible et invaincu, en échange de l’aide de ce-dernier à faire la conquête de la lointaine princesse Brunehilde, réputée pour éconduire tous ses prétendants après les avoir soumis à une épreuve de force. Mais, après avoir récupéré celle-ci avec succès et alors que les deux unions sont célébrées conjointement, Brunehilde se refuse toujours à Gunther. A la demande de son désormais beau-frère, Siegfried, qui a récupéré du nain Alberich une cape d’invisibilité, prend alors en secret sa place durant la nuit pour arriver à mater la farouche jeune femme et lui dérober son anneau qui lui donnait une force surhumaine, Gunther pouvant dès lors consommer sa nuit de noces avec elle. Dix années s’écoulent paisiblement, durant lesquelles les deux couples ont chacun un enfant ensemble. Mais un jour, lors d’un banquet, Kriemhild se vantera un jour de cet exploit accompli par son mari auprès de Brunhilde, ce qui déclenchera une querelle entre les deux femmes et mènera à l’assassinat de Siegfried par Hagen, qui a pris connaissance de son point faible situé entre les omoplates, pour venger l’honneur de Brunhilde. Lors de ce meurtre organisé à l’occasion d’une partie de chasse en forêt, il est assisté par Gunther qui voit là de son côté l’occasion de se débarrasser d’un rival trop puissant.

Kriemhild jurera alors de venger la mort de son mari en assassinant son frère Gunther et Hagen, qu’elle désigne comme coupables. Sur la toile ci-dessus, on la voit accuser Gunther devant la dépouille de son mari. La jeune veuve se remariera avec le roi des Huns, Attila, et des années plus tard, elle conviera lors d’une grande fête les Burgondes, en s’assurant bien sûr que ses frères et le sournois Hagen seraient de la partie, auxquels elle tend un piège pour les massacrer eux et leur armée. Après de nombreux combats sanglants, la mort de tous ses frères et l’assassinat de son fils Ortlieb par Hagen, Kriemhild finira par parvenir à tuer Hagen de ses mains, après quoi elle sera immédiatement décapitée elle aussi pour avoir exécuté sommairement un prisonnier. Une fin joyeuse, en somme!

SALAMMBÔ

 

Georges-Antoine Rochegrosse (1859-1938), Salammbô, huile sur toile.
Georges-Antoine Rochegrosse (1859-1938), Salammbô, huile sur toile.

Publié en 1862, Salammbô est l’un des ouvrages les plus aboutis de Flaubert qui raconte la mutinerie des mercenaires berbères employés par Carthage lors de la première guerre punique au IIIème siècle avant Jésus-Christ, ceux-ci étant furieux de ne pas avoir été payés autant qu’ils l’espéraient. Dans l’intrigue, Salammbô est la fille d’Hamilcar, l’un des deux suffètes de Carthage, et elle est dédiée au culte de la déesse Tanit. Lorsqu’il l’aperçoit, le chef des mercenaires libyens, Mâtho, tombe amoureux d’elle, et lors d’un rendez-vous secret, il volera pour elle le voile de la déesse Tanit que personne ne pouvait toucher.

A la fin de l’histoire, après la victoire des Carthaginois sur les mercenaires auxquels Hamilcar a tendu un piège afin qu’ils meurent affamés dans le Défilé de la Hache, et après une ultime bataille perdue par les troupes de Mâtho, les deux amants se font assassiner presque simultanément, le jour du mariage de Salammbô.

Pour exécuter ce chef d’œuvre de la littérature, Flaubert se rendit en Tunisie en 1858  afin de n’omettre aucun détail qui pourrait contribuer au témoignage d’un Orient violent et sensuel tel qu’il était fantasmé par l’écrivain à une époque où l’orientalisme était très en vogue en Europe.

Georges Rochegrosse était l’un des peintres français les plus en vue au Salon à la fin du XIXème siècle. Auteur de toiles aux couleurs vibrantes, il puise ses inspirations dans de nombreuses sources, notamment chez les opéras de Wagner qui lui vaudront l’une de ses plus grandes réussites, Le chevalier aux fleurs. Quand l’éditeur  A. Ferroud lui demande d’illustrer Salammbô de Flaubert, le peintre en tirera une série d’aquarelles et de peintures marquées par l’influence orientaliste qui imprègne l’ensemble de son œuvre.

 

Gaston Bussière (1862–1928),Salammbô,1907,huile sur toile,collection privée.
Gaston Bussière (1862–1928),Salammbô,1907,huile sur toile,collection privée.

Gaston Bussière est un peintre symboliste français. Il réalisera de nombreuses peintures inspirées de la littérature et des légendes, en représentant des figures féminines oniriques dont le romantisme se confond avec la sensualité.

TITANIA- LE SONGE D’UNE NUIT D’ÉTÉ

Frederick Howard Michael (1865–1936), Titania, 1897, huile sur toile, collection privée.
Frederick Howard Michael (1865–1936), Titania, 1897, huile sur toile, collection privée.

Titania est le principal personnage féminin d’une autre pièce illustre de Shakespeare, le Songe d’une nuit d’été, publié en 1600. Titania est la reine des fée et l’épouse du roi des elfes Obéron. Après qu’une dispute ait éclaté au sein du couple, Obéron charge Puck, un lutin farceur, de jeter un sort à sa femme endormie afin qu’elle tombe amoureuse de la première personne qu’elle verrait à son réveil. Malheureusement pour elle il s’agira de  Nick Bottom, un tisserand qui répétait une pièce de théâtre dans la forêt et que Puck a affublé d’une tête d’âne.

Paul-Léon Gervais, La folie de Titania,1897, huile sur toile, Musée des Augustins.
Paul-Léon Gervais, La folie de Titania,1897, huile sur toile, Musée des Augustins.

Satisfait de son tour, Obéron ordonnera finalement à Puck au point du jour de verser un antidote sur les paupières de Titania et de lever l’enchantement sur Nick Bottom. A son réveil, Bottom se lancera dans une longue tirade en croyant avoir fait un rêve, ce qui explique le titre de la pièce.

Même si la pièce comporte de nombreuses intrigues, au XIXème siècle, c’est la mésaventure de Titania orchestrée par son mari Obéron qui attire l’attention d’un nombre formidable d’artistes britanniques en quête d’images pittoresques, à une époque où le genre féerique est très apprécié du public. La reine des fées est représentée le plus souvent à trois moments différents de la pièce: en grande pompe auprès son mari et entourée de son peuple, endormie alors que le lutin s’apprête à lui jeter un sort, et à son réveil auprès de  Nick Bottom dont elle tombe amoureuse.

 Edwin Henry Landseer (1802–1873),Scene from A Midsummer Night's Dream. Titania and Bottom, 1848-51, huile sur toile, National Gallery of Victoria, Melbourne.
Edwin Henry Landseer (1802–1873),Scene from A Midsummer Night’s Dream. Titania and Bottom, 1848-51, huile sur toile, National Gallery of Victoria, Melbourne.

Pour lire un des ouvrages évoqués dans l’article, voici les liens:

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2 pensées sur “10 héroïnes incontournables de la littérature

  • 22 février 2018 à 13 h 37 min
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    Super article et super sélection de tableaux! Quel plaisir de retrouver toutes ces histoires tragiques, épiques, de femmes souvent victimes de leur destin qui les lient à des hommes qui seront au centre de leurs bonheurs et de leurs drames… Merci beaucoup 🙂

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    • 22 février 2018 à 19 h 04 min
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      Merci ! 🙂

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