10 héroïnes incontournables de la littérature

Bon, bien sûr il y a aussi des héros, mais comme on le sait, les peintres ont toujours eu un petit penchant pour représenter ces dames. On part tout de suite à la rencontre de dix héroïnes de la littérature. Leur point commun? Elles en ont vu de toutes les couleurs!

FANTINE- LES MISÉRABLES

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Margaret Bernadine Hall (1863 – 1910), Fantine, 1886, Walker Art Gallery.

Fantine est la jeune mère de Cosette dans Les Misérables de Victor Hugo, dont l’histoire est présentée dans le tome I du roman publié en 1862. Jeune femme issue du monde ouvrier ayant décidé de tenter sa chance à Paris, elle est dotée d’un physique agréable, dont Victor Hugo fait le portrait suivant:

Fantine, c’était la joie. Ses dents splendides avaient évidemment reçu de Dieu une fonction, le rire. […] Ses épais cheveux blonds, enclins à flotter et facilement dénoués et qu’il fallait rattacher sans cesse, semblaient faits pour la fuite de Galatée sous les saules. […] Éclatante de face, délicate de profil, les yeux d’un bleu profond, les paupières grasses, les pieds cambrés et petits, les poignets et les chevilles admirablement emboîtés, la peau blanche laissant voir çà et là les arborescences azurées des veines, la joue puérile et fraîche, le cou robuste des Junons énigiétiques, la nuque forte et souple, les épaules modelées comme par Coustou. […] Sculpturale et exquise. […] Fantine était belle, sans trop le savoir.

La jeune fille s’engagera dans une relation avec un certain Tholomyès de neuf ans son aîné, dont elle tomba enceinte et accoucha d’une petite fille, Euphrasie, qu’elle surnomme Cosette. Cependant, son bonheur sera de courte durée car elle finit par être abandonné par son amant peu scrupuleux alors que sa fillette est encore un bambin et se verra contrainte de confier sa fille qu’elle adore aux aubergistes Thénardier pour refaire sa vie dans sa ville natale, Montreuil, dans l’espoir de pouvoir la récupérer dans des jours meilleurs. Fantine connaîtra par la suite un sort des plus pathétiques et ne devra malheureusement jamais retrouver sa fille, puisqu’ayant été renvoyée de la fabrique où elle travaillait en raison des rumeurs liées à sa condition de fille-mère, un statut social honteux au XIXème siècle, elle est obligée de vendre tout ce qu’elle possède, y compris ses dents et ses cheveux, avant de tomber dans la prostitution pour continuer à payer la pension faramineuse exigée par les Thénardiers.

Ce tableau exécuté par une artiste féminine se montre particulièrement sensible à la détresse de Fantine et insiste sur sa misère et son statut de fille-mère, seule et regardant dans le vide, tout en soulignant son amour maternel à travers un geste protecteur envers sa fille endormie dans son berceau.

MARIANA- MEASURE FOR MEASURE

John Everett Millais (1829-1896), Mariana, 1851, huile sur bois, Tate Britain.
John Everett Millais (1829-1896), Mariana, 1851, huile sur bois, Tate Britain.

Ce tableau du peintre britannique John Everett Millais s’inspire, à l’instar de nombreux tableaux préraphaélites qui privilégient les thèmes littéraires, d’un personnage de Shakespeare. Il s’agit ici de Mariana, qui apparaît dans la pièce Mesure pour Mesure écrite entre 1601 et 1606, où, étant auparavant fiancée au puissant juge Angelo, caractérisé par son égoïsme, celle-ci s’est vue répudier lorsqu’elle a perdu sa dot dans un naufrage dramatique qui causa également la mort de son frère. Alors qu’elle mène une existence lasse et recluse, elle est à nouveau confrontée à son ancien fiancé lorsque celui-ci, éprouvant du désir pour la très vertueuse Isabella, propose à cette-dernière un chantage infâme: soit elle couche avec lui, soit il condamne son frère à mort. Mariana consent alors à prendre, à la faveur de l’obscurité, la place d’Isabella dans le lit d’Angolo, qui ne se rendra pas compte du subterfuge. Finalement, Angelo sera puni de son hypocrisie, qui le rendait intransigeant en matière d’immoralité sexuelle alors qu’il n’appliquait pas ces principes, et il sera contraint par le duc de la ville d’épouser Mariana.

La peinture de Millais était accompagnée de ces vers de la pièce Mariana de Tennyson, écrite en 1830 d’après la pièce de Shakespeare, traduits ici en français: « Elle disait seulement: «Ma vie est triste, Il ne vient pas, dit-elle; Elle disait: «Je suis fatigué, lasse», Je voudrais être morte! « 

Les préraphaélites voulaient créer des œuvres d’art qui induisent un sentiment de moralité et exaltent les vertus de ce monde, et pour cela ils avaient fréquemment recours à des topos littéraires. Millais a également utilisé la poésie de Tennyson comme point de départ pour sa peinture. Ce tableau est rempli de détails qui aident le spectateur à lire le récit de l’œuvre avec la poésie de Tennyson. Tout, de la broderie roulée que Mariana confectionne ou des feuilles à l’extérieur de la fenêtre rappelle au spectateur le récit de la jeune femme rejetée par son fiancé parce que sa dot a été perdue en mer, son attente et du passage du temps. La pose arquée de la jeune femme accentue ce sentiment en donnant l’impression qu’elle a été assise trop longtemps et qu’elle doit se lever pour s’étirer avant de s’asseoir à nouveau. La broderie enroulée sur la table donne également au spectateur une idée de la durée pendant laquelle Mariana a travaillé dessus. Enfin, la petite souris que l’on aperçoit sur le sol vers le coin en bas à droite est également un détail que Millais a emprunté au poème de Tennyson.

MARGUERITE – FAUST

Autre héroïne au destin tragique, Marguerite, principal personnage féminin de l’oeuvre la plus célèbre de la littérature allemande, Faust de Goethe (1808). Dans le récit, Marguerite, surnommée Gretchen, est une jeune fille de 15 ans que le docteur Faust, qui a fait un pacte avec le diable Méphistophélès lui permettant de rajeunir, croise par hasard et dont il tombe amoureux. Marguerite finira par céder aux avances de Faust dont elle tombe aussi amoureuse, ce qui entraînera l’intrigue dans une succession de malheurs.

Thomas Jones Barker (1815–1882) , Margaret at the cathedral, Faust , 1866, huile sur toile, collection privée.
Thomas Jones Barker (1815–1882) , Margaret at the cathedral, Faust , 1866, huile sur toile, collection privée.

Ce tableau fait ainsi référence aux premiers malheurs de la jeune Gretchen, qui se recueille sur le corps de sa mère décédée en raison d’un somnifère qui lui a été administré pour couvrir les deux amants. L’héroïne a également causé au cours de la même nuit la mort de son frère, qui, ayant découvert l’identité de l’amant de sa soeur, a provoqué Faust en duel et, le diable aidant son protégé à l’emporter, a été blessé à mort, ayant simplement le temps de maudire sa soeur avant de trépasser. Marguerite exprime ici son désespoir et ses remords et déplore les malheurs dont elle est elle-même responsable par sa relation avec Faust: « Pries-tu pour l’âme de ta mère Qui, par ta faute, lentement S’endormit dans un long martyre ? »

Pascal Dagnan-Bouveret (1852–1929), Marguerite au Sabbat, 1911, huile sur toile, Musée Municipal de Cognac.
Pascal Dagnan-Bouveret (1852–1929), Marguerite au Sabbat, 1911, huile sur toile, Musée Municipal de Cognac.

Cette seconde peinture décrit parfaitement l’ultime tragédie de Marguerite qui, après avoir séduite par Faust et être tombée enceinte, a été abandonnée par lui et a tué de désespoir l’enfant né de leur amour. En compagnie de Méphistophélès, Faust assiste à un sabbat de sorcières quand soudain il a une vision de Marguerite jaillissant des flammes de l’Enfer portant le cadavre de leur enfant mort dans les bras, une vision qui le conduira sur la voie du repentir et le mènera à sa rédemption finale.

En raison du meurtre de son enfant, Gretchen sera quant à elle envoyée en prison, où elle sera peu à peu atteinte de démence, jusqu’au jour où Faut viendra lui rendre visite. Reconnaissant désormais les affinités diaboliques de l’homme qu’elle a aimée, Marguerite refuse de le suivre et implore Dieu de lui accorder sa grâce, ce qu’il fera lors des derniers instants de la pièce.

OPHÉLIE- HAMLET

John Everett Millais (1829-1896), Ophélie, 1852, huile sur toile, Tate Britain.
John Everett Millais (1829-1896), Ophélie, 1852, huile sur toile, Tate Britain.

Ce tableau représente le personnage d’Ophélie dans Hamlet, l’une des pièces les plus connues de Shakespeare publiée en 1603. Ophélie est la fiancée du prince du Danemark Hamlet, dont le père a été assassiné par son oncle Claudius qui a pris le pouvoir, et qui, après avoir eu des visions de son spectre,  feint la folie pour pouvoir venger son meurtre. Rejetée à dessein par Hamlet pour pouvoir accréditer sa propre folie, avant d’assister au meurtre involontaire de son père Polonius par ce-dernier, Ophélie sombre dans la folie et mourra noyée dans un ruisseau.

Le personnage d’Ophélie, sa tragédie et son suicide énigmatique ont joui d’une immense fortune littérair et artistique, d’Arthur Rimbaud à Melancholia de Lars von Triers en passant par les peintres préraphaélites comme ici.

MIRANDA- THE TEMPEST

John William Waterhouse (1849–1917) ,Miranda: The Tempest, 1916, huile sur toile, collection privée.
John William Waterhouse (1849–1917) ,Miranda: The Tempest, 1916, huile sur toile, collection privée.

Miranda est le principal personnage féminin de The Tempest, La Tempête en français, l’une des dernières pièces de William Shakespeare représentée pour la première fois en 1611. Miranda est la fille du duc de Milan, Prospero, qui, lorsqu’il a été renversé par son frère Antonio aidé de son comparse le roi de Naples, Alonso, a été abandonné sur une île déserte avec sa fille, alors âgée de trois ans. Cette île s’avéra peuplée de créatures magiques, notamment un esprit nommé Ariel et un monstre nommé Caliban dont Prospéro a fait ses serviteurs, pouvant ainsi faire appel à leurs pouvoirs surnaturels quand il le désire.

Ayant appris grâce aux esprits que les usurpateurs du trône se trouvaient dans un navire au large de l’île, Prospero utilise sa magie pour provoquer leur naufrage et les faire échouer à différents emplacements de celle-ci. Après plusieurs rebondissements et différentes tentatives de complots déjouées entre les différents personnages, et après que Miranda et Ferdinand, le fils du roi de Naples, soient tombés amoureux l’un de l’autre, Prospero charge Ariel de préparer des vents favorables à leur départ de l’île, avant de l’affranchir et que tous s’en repartent à Naples, où les deux jeunes gens pourront se marier.

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2 pensées sur “10 héroïnes incontournables de la littérature

  • 22 février 2018 à 13 h 37 min
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    Super article et super sélection de tableaux! Quel plaisir de retrouver toutes ces histoires tragiques, épiques, de femmes souvent victimes de leur destin qui les lient à des hommes qui seront au centre de leurs bonheurs et de leurs drames… Merci beaucoup 🙂

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    • 22 février 2018 à 19 h 04 min
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      Merci ! 🙂

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