Qu’est-il arrivé aux 7 merveilles? – Les Jardins Suspendus de Babylone

Des jardins suspendus de Babylone au colosse de Rhodes, en passant par le mausolée d’Halicarnasse ou la pyramide de Khéops… les 7 Merveilles du Monde antique sont sans doute les constructions les plus connues de l’Histoire, acclamées depuis 2000 ans comme des monuments aux proportions ayant dépassé l’entendement. Pourtant aujourd’hui, de ces chefs-d’oeuvre de l’Antiquité, un seul est resté debout. Retour sur l’histoire des 7 Merveilles du Monde, avec aujourd’hui l’épopée des jardins suspendus de Babylone, de leur création à leur disparition dans les méandres de l’Histoire…

Ce qu’on désigne aujourd’hui sous le nom des Sept Merveilles du Monde est une liste de sept monuments construits durant l’Antiquité, dont les proportions, la beauté ou la technique dépassent tous les autres édifices de l’époque, et qui représentent tout le savoir-faire des premières civilisations, ces-dernières ayant pu construire d’aussi importantes structures malgré leurs moyens rudimentaires. Loin d’être une invention moderne, cette liste trouve ses origines dans les premiers récits de voyageurs et érudits grecs, qui en parcourant le monde connu ont répertorié et décrit les plus surprenantes constructions qu’ils ont pu apercevoir. Au cours des 2000 ans ayant suivi la rédaction de la première liste des Sept Merveilles par Philon de Byzance au IIIeme siècle avant J.C., les monuments choisis pour faire partie de cette liste n’ont pas cessé de changer.

7merveilles2
Les 7 Merveilles du Monde vues par les artistes. De haut en bas et de gauche à droite: le colosse de Rhodes, le Temple d’Artémis, le Mausolée d’Halicarnasse, la statue de Zeus en Olympie, la tour de Pharos, la pyramide de Khéops et les jardins suspendus de Babylone.

La première liste de Philon de Byzance, rapportée notamment par Antipatros de Sidon au IIeme siècle avant J.C., reprend six des sept monuments qu’aujourd’hui nous considérons comme les Sept Merveilles du Monde, remplaçant le Phare d’Alexandrie qui n’était pas encore achevé à l’époque par les remparts de Babylone. La liste actuelle s’est constituée autour du XIVeme siècle, les auteurs ayant progressivement éliminé les remparts pour les remplacer par une autre construction majeure de l’Antiquité… Des sept constructions de la liste, aujourd’hui ne subsiste que la Pyramide de Khéops, toutes les autres ayant disparu. Cette série d’article se base donc sur la liste canonique et la plus récente des Sept Merveilles du Monde Antique, à savoir:

  • La Pyramide de Khéops à Memphis
  • La Statue Chryséléphantine de Zeus en Olympie
  • Le Mausolée d’Halicarnasse
  • Le Colosse de Rhodes
  • Le Temple d’Artémis à Ephèse
  • Le Phase d’Alexandrie
  • Et enfin, les Jardins suspendus de Babylone, que nous vous proposons de découvrir dès maintenant…
Waldeck_Hängende_Gärten_der_Semiramis
Les jardins suspendus de Semiramis, peinture réalisée en 1900 par H. Waldeck. Semiramis est selon la légende la reine fondatrice de la cité de Babylone.

 

Deuxième plus ancienne construction de cette liste, après la pyramide de Khéops et ses 4600 ans, les jardins suspendus de Babylone sont aussi l’une des merveilles les plus mystérieuses. Bérose le Chaldéen, prêtre et historien ayant vécu dans la ville antique d’Euphrate au IVe siècle avant J.C., attribue leur construction au roi Nabuchodonosor II deux siècles auparavant, le souverain ayant voulu rappeler ainsi à son épouse Amytis de Médie, exilée dans le désert aride et inhospitalier de Babylone, les contrées boisées de sa région natale. Mais c’est une tout autre particularité de ces jardins qui leur donne ce nom : d’après les auteurs hellénistes ayant décrit ce chef-d’œuvre d’architecture, les jardins de la grande Babylone ne se trouvaient pas au niveau du sol, mais étaient suspendus dans les airs, sur des terrasses soutenues par de massives colonnes, et irrigués par un ingénieux système de canaux et de vis d’Archimède faisant monter l’eau de l’Euphrate jusqu’à cette structure aérienne.

Hanging_Gardens_of_Babylon_by_Ferdinand_Knab_(1886)
Les jardins suspendus de Babylone, par Ferdinand Knab (1886).

Mais au risque d’en décevoir beaucoup, et l’une des raisons pour lesquelles ces jardins suspendus sont si mystérieux, l’existence de cette merveille est loin d’être prouvée aujourd’hui: les différentes fouilles réalisées sur le site de Babylone en Irak n’ont pour l’instant pas révélé leur emplacement. Cette absence de traces archéologiques remet d’autant plus en cause leur existence que toutes les autres constructions antiques attribuées à la ville ont été identifiées, du temple de Mardouk au ziggourat d’Etemenanki qui aurait inspiré la Tour de Babel dans les récits bibliques, et que même les remparts de Babylone figurant autrefois dans la liste des Sept Merveilles ont été trouvés. De plus, les sources antiques décrivant les jardins suspendus sont peu nombreuses, parfois fragmentaires ou incomplètes, et on est étonné de voir que même Hérodote, brillant historien grec ayant de nombreuses fois visité Babylone, n’évoque nul-part dans ses écrits l’existence de cette merveille.

1200px-Pieter_Bruegel_the_Elder_-_The_Tower_of_Babel_(Vienna)_-_Google_Art_Project_-_edited
La Tour de Babel, représentée par Pieter Bruegel en 1563, une autre des merveilles légendaires de la ville de Babylone, qu’on associe aujourd’hui au ziggourat d’Etemenanki.

Il est fort probable que les récits rapportant l’existence des jardins suspendus ne soient en réalité qu’une exagération de la beauté et l’ingéniosité de la véritable merveille que constitue la ville de Babylone en elle-même. En effet, la ville – bien que située dans un désert aride et impitoyable – est connue durant l’Antiquité pour abriter de magnifiques jardins, qui, s’ils n’étaient pas suspendus dans les airs comme le veut la légende, ont peut-être aussi été perçus comme flottant au-dessus de la ville par des voyageurs frappés de mirages s’y rendant pour la première fois. La présence des remparts de Babylone dans les listes primitives pourrait aussi suggérer que la description de ces jardins suspendus ne serait donc pas celle d’un lieu en particulier dans la cité antique, mais celle de la ville même… ou peut-être celle d’une autre Babylone?

En 2013, l’assyriologue Stéphanie Dalley émet l’hypothèse que les jardins suspendus n’auraient pas été construits à Babylone, en se basant sur les récents déchiffrages de la langue akkadienne qui montrent que le nom Babylone a été porté par plusieurs cité mésopotamiennes, notamment par la ville de Ninive, souvent confondue par les auteurs grecs avec la capitale de Nabuchodonosor II. Plusieurs éléments semblent accréditer cette hypothèse :  tout d’abord, les Assyriens sont connus pour leurs jardins d’agrément et leur maîtrise des techniques d’irrigation que nécessiteraient des jardins suspendus, et en outre, un bas-relief récupéré sur un palais de Ninive et aujourd’hui conservé au British Museum représente ce qui ressemble à s’y méprendre aux descriptions des jardins suspendus faites par les auteurs grecs… Mais cette récente théorie reste encore à prouver, et même si les traces d’un jardin suspendu étaient trouvées à Ninive, cela ne prouverait évidemment pas qu’une telle structure n’ait pas également existé à Babylone.

Gardens_of_Ninevah
Photographie du bas-relief conservé au British Museum montrant les jardins suspendus de Ninive.

Quant à la ville de Babylone, sa disparition coïncide avec le crépuscule de la civilisation mésopotamienne : après que les centres économiques et politiques du pouvoir se soient déplacés plus au nord vers Bagdad sous la domination des Grecs, la population de la ville déclina sous la période parthe. Pline l’Ancien décrit la ville au début de notre ère comme un champ de ruines, où seuls les monuments religieux comme les temples restent actifs, et bien que la ville reste un carrefour commercial important dans la région lors de la montée du christianisme, la Babylone antique est définitivement abandonnée sous la période musulmane, ne laissant que le petit village de Bābil et des ruines désormais utilisées comme carrières de pierres pour de nouvelles constructions. Nul doute que si les jardins suspendus de Babylone ont effectivement existé, ils ont eux aussi disparu dans le désert avec la ville les ayant abrités…

Partager l'article:
0

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *